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Pour la directrice de la fiction de FRANCE 2, SAINT-GEORGE pas assez
En 1775, le chevalier de Saint-George,"homme de couleur", n'était pas suffisamment "emblématique" pour
qu'on lui confie la direction de l'Opéra. Une pétition raciste s'indignait sous le prétexte qu'il était
"mulâtre". Deux actrices et une danseuse à la peau claire invoquaient leur "honneur".Presque deux cent trente plus tard, on pourrait croire que les choses ont changé. Pas du tout !
"Ce personnage [...] n'est pas une figure sufisamment emblématique pour que nous puissions lui consacrer
une de nos fictions de prestige, ose écrire en toute impunité, le 27 novembre 2004, dans une lettre très
officielle, Perrine Fontaine, directrice de la Fiction de France 2, chaîne du service public financée par
la redevance payée aussi par des millions de Français peu "emblématiques".C'est étrange, car naguère le maire de Paris trouvait Saint-George assez "emblématique" pour lui donner le
nom d'une rue, la ministre de l'Outre-mer le trouve assez emblématique pour utiliser sa musique sur son
standard téléphonique et la même chaîne, France 2, le trouve assez emblématique pour demander l'achat des
droits de diffusion du spectacle mis en scène par Bartabas (dont je suis l'auteur) qui a rassemblé à
Versailles, en six soirées, 50 000 Français, curieux de découvrir la vie de ce héros si peu "emblématique".Alors, qui est "emblématique" pour France 2 ? Sans doute Napoléon Bonaparte, pour autant qu'on se
souvienne de la mémorable "fresque" de 2002, adaptée du livre de Max Gallo, filmée par Yves Simonneau et
interprétée par Christian Clavier. On y avait caché aux téléspectateurs le rétablissement de l'esclavage,
simple "point de détail" peu "emblématique", il est vrai.Qu'on ne s'étonne donc plus de voir et d'entendre ledit Max Gallo, sur France 3, déclarer, le 3 décembre
2004, que le rétablissement de l'esclavage par Napoléon n'est pas un crime contre l'Humanité. La diffusion
de ce genre de propos n'est pas un dérapage, c'est l'effet d'une politique délibérément appliquée par
certains hauts responsables du service public qui vouent le plus profond mépris à ces Français originaire
d'Outre-mer à qui l'on refuse emplois et logements parce qu'ils ne sont pas assez "emblématiques".Doit-on laisser ces néo-colons de l'audiovisuel public insulter Saint-George sans réagir ? En 1775, face
à l'incident raciste qui a écarté Saint-George de l'Opéra, la communauté des musiciens a organisé un
concert de solidarité. Et nous, en cette fin d'année 2004, qu'allons-nous faire en réaction à ce black-out
du chevalier Saint-George sur France 2, cyniquement avoué sur du papier à en-tête ? Laisser faire, baisser
la tête, comme d'habitude, ou faire entendre enfin le son du lambi ?Claude Ribbe
Liens sur Claude Ribbe :
http://www.grioo.com/info1309.html
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